Elie Baussart

Conscience de Wallonie

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Bulletin n°67 : Un autre monde est-il possible ?

1 avril, 2013 (20:08) | accueil, Actualites | By: Bernard

Du 26 au 30 mars dernier s’est tenu à Tunis le Forum Social Mondiale (FSM). Ce Forum est une moment de convergence des mouvements sociaux et citoyens qui s’inscrivent dans une perspective alter mondialiste. Autrement dit : comment penser l’évolution du monde et comment renforcer le processus au service des mouvements sociaux et citoyens ?
Le FSM de Tunis se donnait comme enjeux essentiels à aborder : la situation mondiale, la stratégie des mouvements, l’évolution des printemps arabes (le choix de Tunis pour de Forum est en soi tout un symbole), le nouveau cycle de luttes et de révolution et l’évolution du processus des forums sociaux.
Il n’est évidemment pas possible d’aborder ici tous ces points. Nous nous limiterons à brosser un tableau des mouvements sociaux et citoyens eu égard à l’évolution de la situation mondiale. Pour le reste, nous renvoyons nos lecteurs au site internet du FSM, particulièrement riche en informations : http://www.fsm2013.org
La crise du capitalisme est profonde, mais la bourgeoisie financière n’en est pas pour autant ébranlée. La logique dominante reste la financiarisation. Mais par rapport à cela, une réelle différenciation s’installe entre continents. Les mouvements sociaux tentent de s’adapter à cette évolution.
Interviewée le 27 mars 2013 dans le journal METRO, Anne DEMELENNE, secrétaire générale de la FGTB, et à ce titre présente au Forum, déclare : « Vous le savez, nous vivons la mondialisation économique, nous ne pouvons donc manquer ce rendez-vous important en vue de mondialiser aussi les actions sociales… Je vais par exemple participer à un atelier sur la concertation sociale. . Je vais mettre en avant le modèle belge, mais aussi mettre en garde contre les tentatives de mise sous tutelle de cette concertation. En ce moment, le gouvernement nous empêche toujours de négocier sur les salaires ». On est, en effet, en Europe, dans une logique d’économies budgétaires élevées au rang de véritable dogme. Mais les mouvements sociaux ont à affronter, outre la précarité, des formes renaissantes de xénophobie et l’absence d’un projet européen alternatif qui puisse traduire en termes politiques et culturels l’indispensable unité du mouvement social.
Mais ailleurs ?
En Amérique Latine, des régimes développementalistes mettent en place des politiques post-néolibérales qui combinent gages au marché mondial des capitaux et politiques sociales de redistribution. A priori, ce pourrait être positif si ce n’est que de tels régimes banalisent l’altermondialisme et fragmentent les mouvements sociaux. En Asie, des alliances combinent les bourgeoisies étatiques, nationale et mondialisées.
Ainsi que l’écrit Gustave MASSIAH, représentant au Conseil international du FSM « se pose la question sur le rôle des mouvements sociaux des nouvelles puissances qu’on appelle faute de mieux pays émergents ». Dans ces deux continents, « le mouvement social s’organise autour des travailleurs en lutte pour leurs droits et leurs salaires, qui passent des alliances spécifiques avec la bourgeoisie étatique, d’autant que cette dernière contrôle une partie de l’appareil productif ». Très différent donc de ce qui se vit en Europe où les Etats ne sont plus que des régulateurs du marché le plus souvent et en contrôlent plus guère l’appareil productif.
Au Moyen Orient, les mouvement sociaux sont confrontés à l’émergence des mouvements politiques se référant à l’Islam d’ailleurs confrontées à l’instrumentalisation des grandes puissances tentant de compenser la chute de leurs anciens alliés dictateurs.
En Afrique, course aux matières premières, conflits territoriaux et guerres brouillent la vivacité des mouvements sociaux.
En Amérique – Canada et U.S.A – les nouveaux mouvements, occupy et carrés rouges, sont confrontés à la réaction violente des pouvoirs économiques et à l’émergence des conservatismes plus qu’inquiétants.
Ce que nous disent les différents forums sociaux, c’est que oui, un autre monde est possible. Oui, chaque société peut s’organiser autrement que par la logique dominante de la subordination au marché mondial des capitaux. Oui, une rupture est indispensable : sociale, écologique et démocratique. De nouvelles manières de produire et de consommer sont possibles : nouvelles formes de la propriété, contrôle de la finance, le buen vivir (NDLR : le « bien vivre »), la prospérité sans la croissance, des responsabilités communes et différenciées…
On en est loin, évidemment. Ce que recommandent finalement les mouvements sociaux et citoyens, c’est de s’installer dans la résistance. La résistance au fatalisme, au pragmatisme tellement en honneur de sainteté dans nos régimes sociaux-démocrates.
Un autre monde est possible : le capitalisme, le néo-libéralisme ne peuvent pas être les derniers méfaits de l’homme.
Elie BAUSSART avait déjà bien conscience de cela quand il écrivait, en 1945 ( !) : « Le libéralisme s’impose comme la Loi et les Prophètes d’une société aux assises économiques complètement renouvelées par l’accroissement rapide de la production. Le dieu de cette société, c’est l’Argent : il est l’étalon des valeurs ; il régente le comportement social des hommes ; il influence la pensée et les arts ; il dicte la politique des Etats-Unis. Faut-il dès lors s’étonner que la civilisation, c’est-à-dire notre manière de penser, de sentir et de vivre soit marquée du signe du matérialisme profond et universel, que dissimulent mal les prestiges de l’idéalisme et le mythe de la liberté ? »
Il y avait là en germes les constats qui devaient animer quelques décennies plus tard les mouvements sociaux et citoyens.
Deux mille ans avant lui, un certain Jésus de Nazareth avait déclaré qu’on ne peut servir Dieu et l’Argent. Il aurait pu tout aussi bien dire : on ne peut servir l’Homme et l’Argent.
Et Elie BAUSSART de poursuivre en ces termes : « Il importe peu que l’Eglise Catholique condamnât le libéralisme, si l’organisation économique et sociale dans laquelle ce libéralisme s’incarnait n’a gardiens plus vigilants que nous ».

Il importe donc peu de condamner, ici et là, il importe surtout d’être vigilants, c’est-à-dire résistants. C’est à quoi nous invitent les mouvements sociaux et citoyens qui se sont réunis à Tunis. C’est à quoi une association comme la nôtre ne peut que souscrire.

Bernard DE COMMER.

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Fédéralisme ? Confédéralisme ? Indépendance ?

Le débat ne date pas d’aujourd’hui. A maintes occasions, Elie BAUSSART a eu à s’exprimer à ce propos. Dans « La Wallonie se cherche », par exemple . En voici deux extraits significatifs, et qui, bien que écrits il y a quasi trois-quarts de siècle semblent l’avoir été tout dernièrement :
« (La Wallonie) va-t-elle, comme elle l’a fait jusqu’ici, continuer à identifier le bien commun de la Wallonie et le bien commun de la Belgique, celui-là étant toujours garanti quand celui-ci est assuré, ou, pour que ses fils aient la place et les possibilités qui leur reviennent dans la communauté nationale, va-t-elle définir et pratiquer une politique wallonne, à l’instar de la Flandre, qui poursuit, elle, une politique flamande ?
Je pense que nous n’avons pas le choix »
Se positionnant pour le fédéralisme, Elie BAUSSART fait remarquer qu’il ne faut pas
que « les Flamands puissent, selon les nécessités de leur politique, tantôt invoquer l’autonomie culturelle pour soustraire ce qui leur plaît à la décision nationale, tantôt user de leur majorité parlementaire pour faire prédominer dans le royaume leurs vues et servir leurs intérêts. C’est un jeu de dupes, auquel la Wallonie ne se prêtera pas »
Dans la Cité chrétienne, Elie BAUSSART s’adressera, quelques années plus tard, pressentant la montée en puissance de l’identité bruxelloise et stigmatisant au passage la suffisance souvent affichée par Bruxelles à l’égard de la Wallonie, en ces termes aux Bruxellois :
« Nous ne leur (aux Bruxellois) demandons pas de se considérer comme des Wallons, tous les Belges de langue française ne sont pas des Wallons, et ce carrefour national et ces messieurs du carrefour se trouveraient humiliés d’être pris pour ces provinciaux… dont ils vivent. Mais devant la très réelle et très immédiate menace d’hégémonie flamande, dont ils pâtiraient comme nous, leur intérêt le plus évident leur commande de s’entendre avec nous »
Une Fédération Wallonie/Bruxelles qui ne dit pas (encore) son nom….