Elie Baussart

Conscience de Wallonie

Skip to: Content | Sidebar | Footer

Bulletin n° 79 : Propos wallons à hue et à dia

8 octobre, 2015 (19:18) | accueil | By: Bernard

Lors des récentes fêtes de Wallonie, Paul MAGNETTE, par ailleurs ministre-président wallon, a appelé ses concitoyens à, je cite, « une fierté collective » allant jusqu’à parler de « notre petite patrie » aidée d’un « patriotisme économique ». Et de souligner « les signes nombreux et puissants d’un nouvel enthousiasme » et « d’une révolution tranquille qui est en train de s’accomplir » tout en stigmatisant  le fait que trop souvent on soit encore « dans le registre de la  lamentation ».

Dans LE SOIR du 22 septembre, Marc JACQUEMAIN (ULg) définit en quoi l’identité (en ce qui nous concerne wallonne) pourrait servir de moteur au redressement économique : « C’est toute la logique du patriotisme économique : appeler les investisseurs, les salariés, les consommateurs à se sentir liés dans leurs comportements respectifs à la région dont ils sont issus. Une logique en ce sens qui se développe dans la plupart des pays d’Europe en réaction à la déception que constitue l’Europe de ces cinquante dernières années. Ce n’est pas du protectionnisme au sens  juridique du terme mais du patriotisme économique »

Ce que semble ignorer Paul MAGNETTE, c’est que la Wallonie ne s’en sortira jamais vraiment tant qu’elle reste dans le giron belge. C’est peut-être marginal, mais le nouveau plan de la SNCB mal traite la Wallonie : ce plan favorise les déplacements vers Bruxelles – capitale fédérale certes mais aussi capitale de la Flandre – mais offre peu d’incitants aux déplacements au sein de la Région. Pire, dans certaines gares situées au croisement de plusieurs lignes (comme par exemple Arlon), il y avait du potentiel à exploiter. Eh !Bien ! Rien n’a été fait. De plus, les trains vont moins vite et l’amplitude entre le premier train du matin et le dernier train du soir a diminué en moyenne de 1h30 dans 67% des 177 tronçons analysés par la Région.

Rappelons ce que Elie BAUSSART déclarait en son temps, il y a 70 ans :

« Dans ces conditions, il faut donner au peuple wallon la possibilité de servir ses intérêts et d’assurer son destin. L’Etat belge tel qu’il est constitué n’y est plus apte. Il n’y a ni signe, ni espérance qu’il le soit demain. Le peuple wallon le sait ; il le sent. Il est décidé à ce qu’il n’en soit pas perpétuellement ainsi » (LA CITE NOUVELLE, 1945)

C’est aujourd’hui plus vrai encore qu’alors.

Mais bon, ne tirons pas trop sur le pianiste. Dans la problématique des réfugiés, Paul MAGNETTE a déclaré : « Tous les réfugiés de Wallonie sont des Wallons comme les autres » et d’ajouter que « nous devons les considérer comme n’importe quel autre défi de croissance démographique en nous disant seulement que celle-ci est inattendue et rapide, mais nous ne devons pas nous poser la question de savoir d’où ils viennent et pourquoi ». Voilà qui rejoint évidemment la philosophie de notre ASBL et que nous ne pouvons que soutenir. Et c’est sans doute aussi là que nous pouvons placer notre fierté de Wallon, en opposition à ce que l’on entend au Nord u pays par la bouche de Bart DE WEVER qui certes ne représente pas toute la Flandre mais quand même.

Plus surprenant, les propos tenus par Philippe COURARD, président du Parlement francophone. On peut espérer que ces propos sont dus à la fonction qu’il exerce et pas à une conviction profonde. Des parlementaires libéraux, mais éminemment  wallons, à savoir Pierre-Yves JEHOLET  et Jean-Luc CRUCKE proposent de relancer le débat de la suppression de la Communauté française pour une Belgique des Régions. Philippe COURARD réagit au quart de tour : « Pas d’accord. Ce à quoi je tiens aujourd’hui, c’est le maintien de l’Etat fédéral, de la Belgique dans sa forme institutionnelle » et de revenir avec l’habituel, en cas de réouverture du dossier institutionnel (qui d’ailleurs n’a jamais été fermé) : « Les nationalistes flamands vont revenir avec des revendications folles » (LE SOIR du 24/09/2015). Cet argument ne tient pas la route : il est depuis longtemps éculé. Les Flamands ont toujours obtenu ce dont ils rêvaient et cela n’est pas prêt de s’arrêter.

Quand le journaliste demande à Philippe COURARD si régionaliser l’enseignement et la culture pour plus de cohérence ce ne serait pas l’avenir, il répond : « Je sais que c’est la thèse de certains, mais je dis que scinder l’enseignement, ce serait une erreur, et scinder la culture, une erreur aussi » Voilà en tout cas qui prend le contre-pied du Manifeste wallon dans sa version 2003 auquel nous avons souscrit en personne au nom de l’ASBL. On y lit entre autres :

« Bråmint des scoleus tuzèt k’ i fåt redjonålijhî l’ acsegnmint. Insi, on-z aprindreut pår e scole çou k’ on-z åreut dandjî d’ saveur po trover ene plaece. Mins gn a des xhames el voye: l’ acsegnmint ni copete nén al Redjon Walone, et, po dire li sinne, ele doet aler trover ene ôte institucion (li Cminålté Francesse). Kéne ehale ! Aler dmander cwè et kesse a des djins ki n’ kimandèt nén sol minme aroyaedje, et ki prindèt l’ Walonreye po petale di gade dins tos leus programes di scole. Metans: el Kiminålté ni dmande måy si idêye al Walonreye å dfwait des lingaedjes etrindjîs ki les ptits Walons divrént saveur mwaistri. Eyet l’ Kiminålté rifuze di fé moussî dins l’ acsegnmint l’ aprindaedje do walon et des ôtes lingaedjes do payis, ki vont bénrade tourner a cou d’ poyon, si on n’ elzî rind nén do pî tot les raprindant a scole, po s’ endè rsiervi totavå.

De très nombreux enseignants estiment qu’il faut régionaliser l’enseignement de manière, notamment, à mieux articuler éducation proprement dite et formation professionnelle. Mais l’enseignement n’est pas de compétence wallonne et le pouvoir politique wallon doit donc s’associer, au mieux, au pouvoir politique communautaire. Association qui se révèle être une complication inutile et une entreprise hasardeuse : la Communauté, en effet, ne recouvre pas le même espace politique qu’une Wallonie d’ailleurs largement ignorée dans les contenus de l’enseignement communautaire. Ignorée aussi dans le libre choix des langues étrangères que les Wallons devraient maîtriser. Et ignorée dans ses langues régionales dont la disparition constituerait une perte pour son patrimoine culturel. »

Pour plus de détails, nous vous invitons à utiliser le lien suivant : http://rifondou.walon.org/afitcha.html

On se souviendra que le 23 novembre 2010, Paul MAGNETTE, à l’auditorium de l’UT de Charleroi où les régionalistes wallons tenaient leur assemblée générale, ironisait sur l’âge des participants, signifiant par-là que, selon lui, le Mouvement wallon avait pris un coup de vieux.

José HAPPART fulminait : « c’est l’effet de la présidentocratie. Moi, je suis autonomiste et je ne m’en suis jamais caché : et je n’ai plus été ministre. Les revendications autonomistes ne sont pas dans l’air du temps en Hainaut. » L’ex-hérisson fouronnais précisait sa pensée dans l’auditoire : « le plus grave est ailleurs : dans la lâcheté des dirigeants wallons. Aucun ténor ni négociateur wallon présents, ce soir. En Flandre, ils auraient été tous là ou se seraient fait représenter. »

De fait.

Et terminons par cette superbe définition du régionalisme  wallon par Elie BAUSSART en personne :« Le régionalisme wallon que je vois et que je souhaite, c’est donc un régionalisme positif, qui ne soit pas obsédé – au risque d’en être plus ou moins inhibé – par l’idée de résistance aux mouvements flamands qui nous inquiètent, mais bandé par la volonté de servir notre peuple dans tous les domaines. C’est un régionalisme dilaté, qui ne soit pas seulement enté sur le tronc toujours vigoureux de l’humanisme qui a fait l’Europe, mais une expression, une forme originale de cet humanisme » (Considérations sur le problème wallon)

C’est également ce que nous souhaitons

Bernard DE COMMER

Write a comment

You need to login to post comments!