Elie Baussart

Conscience de Wallonie

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Le militant politique

Non aux partis confessionnels.

« C’est aux catholiques dans le plein exercice de leur liberté de chercher et de proposer les solutions qui leur paraîtront les meilleures, de prendre leur part de la lutte commune pour les faire aboutir, très attentifs pour leur part à faire respecter les lois de la morale dans le choix des moyens et des buts poursuivis, attentifs à repousser toute confusion, toute apparence même de confusion, entre le spirituel et le temporel, toute détérioration de la pensée chrétienne par la politique. Les partis confessionnels étant ce qu’ils n’ont jamais cessé d’être, des partis conservateurs, peuvent-ils faire autre chose aujourd’hui et demain que refuser l’histoire ? » (ADIEU A LA DEMOCRATIE CHRETIENNE, 1952)


Non au capitalisme.

« Supposé même que les iniquités passées ne soient plus qu’un souvenir et que leur retour soit désormais impossible, il ne faudrait pas se hâter de proclamer que la question sociale est résolue, que le procès du capitalisme est désormais sans objet, soit qu’il y ait prescription pour les fautes passées, soit qu’il y n’ait plus d’abus à lui reprocher » (ESSAI D’INITIATION A LA REVOLUTION ANTICAPITALISTE)


Non au replis sécuritaire.

« Les deux grandes passions du temps. Repliement sur eux-mêmes des peuples avides de sécurité, hérissés contre l’étranger dissolvant et hostile. Volonté au contraire de tout comprendre et de tout éprouver, à la recherche d’une idéale harmonie entre les nations visitées par les mêmes idées et les mêmes aspirations » (TERRE WALLONE)


L’extrême droite n’est pas de chez nous.
« National-Solidarisme, Vlaamsch National Verbond, en pays flamand, corporatisme de droite dans certains milieux catholiques, Rex à Bruxelles et en Wallonie, autant d’adversaires de la liberté et, en dernière analyse, de la personne…
Dictature, totalitarisme, racisme, tout cela n’est pas de chez nous : 15 siècles d’histoire le prouvent. Le sang des révolutions fume encore comme un holocauste. La vieille passion libertaire est toujours vivace au cœur des individualistes que nous sommes » (Considérations sur la question wallonne »


Le Wallon, citoyen du monde.

«Enfin, par-dessus les frontières régionales et nationales, gardons un esprit et un cœur assez libres pour nous sentir « citoyen de tout homme qui pense » et tenir notre place dans le prodigieux intercourse intellectuel, social et politique du moment. La Wallonie est assez riche d’expérience, de science et d’hommes pour y jouer un rôle, au moins de coopération active. Sous prétexte de régionalisme, ne nous replions pas sur nous-mêmes dans une attitude d’impuissance. Le régionalisme, au contraire, doit être une prise de conscience de ses forces pour mieux remplir ses devoirs envers l’humanité. » (La Terre wallonne)


Deux politiques désormais en Belgique.


« Il y aura désormais, en Belgique, une politique flamande et une politique wallonne, qui ne sont pas antithétiques, ni même divergentes, qui auront chacune leur esprit particulier, et qu’inspireront des considérations où le régional précédera le national, qu’il faudra accorder de façon que le pays n’en souffre pas, qu’au contraire (et c’est à mon avis possible) il en retire un enrichissement. Il va de soi que, quand je parle de politique, il faut entendre, non la lutte des partis, mais une conception et une pratique de la chose publique, telles que le permet le régime démocratique » (La Terre wallonne)

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Réapprendre à rêver pour agir.

On nous reprochera peut-être encore de créer une confusion entre  l’intellectuel et le social, la culture et l’action ? A mon sens, cette différence n’est pas, dans les circonstances présentes au moins, aussi tranchée qu’il semble. Le poète aurait tort qui croirait encore avec Baudelaire que, dans notre société, « l’action n’est pas au cœur du rêve » et l’homme d’action se mutilerait qui se croirait suffisamment armé sans les solides assises que donne une antique culture amoureusement assimilée. Si nous voulons sortir de l’empirisme désorganisateur de nos partis conservateurs, énervés par bientôt cent ans de libéralisme, il est urgent que nous réapprenions à penser et que ceux qui ont retenu les fortes leçons des maîtres prennent, dans les chaires publiques, la place des sophistes et des illuminés. (La Terre Wallonne. Pour la culture française. 15 mai 1920)

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L’Etat, une machine dirigée par la finance nationale et internationale (La question linguistique, 1932)

 » (L’) Etat bourgeois n’est plus qu’une machine administrative , dirigée et contrôlée par la finance nationale et internationale: il faut qu’il (re)devienne le coordinateur des coprs qui le constituent et qui sont ses vértiables organes.

La Banque en est un, qu’on la restitue à sa fonction; les provinces … et les communes en sont d’autres: qu’on leur rende (ou leur octroie) tout ce qui leur revient de droit, comme étant l’expression de communautés de fait, vivantes et nécessaires; la production est anarchique, le capital et le travail vivent sur pied de guerre, le consommateur est livré sans défense à la merci des trusts et de l’agio et cependant les organes existent qui sont régulateurs de l’économie, syndicats ouvriers et patronaux, juridictions professionnelles, coopératives, chambres de commerce, etc. »

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Non aux réformes venues d’en-haut. (Notre régionalisme)

 

Le régionaliste est persuadé qu’on ne réforme pas la société par des décrets providentiels émanés d’un souverain ou d’une assemblée délibérante. Il croit ferme comme roc que la salut de la Wallonie, pour autant que nous ayons un Etat qui nous fasse respecter à l’étranger, assure la justice pour tous et la liberté pour chacun…, prendra naissance dans la Wallonie elle-même.

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Savoir tirer les leçons du passé (Les Catholiques wallons)

 

La Wallonie , dont les deux plus riches provinces sont aujourd’hui livrées aux socialistes, paie les fautes des conservateurs de 90, incapables de saisir les devoirs sociaux qui découlaient des transformations de l’économie industrielle. N’allons pas, maintenant, par une condescendance qui ressemblerait à de la complicité, blesser la susceptibilité et la fierté du peuple wallon qui s’éveille à la conscience de sa personnalité.

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Ne jamais se subordonner à un parti (Chronique régionaliste)

 

Non, je ne donnerais pas deux sous du régionalisme wallon, comme action et surtout comme pensée si nous avions la folie de nous subordonner à un parti, si, sous prétexte d’aboutir plus sûrement et plus rapidement, nous pliions notre activité aux nécessités de la stratégie parlementaire et électorale.

S’ils trouvent que nous allons trop loin ou que, même sans leur être liés, nous les compromettons, que nos amis catholiques nous désavouent ou nous lancent l’anathème: qu’Est-ce que cela peut bien nous faire?… Nous savons bien qu’un jour nous verrons filer à Canossa, vêtus de la robe de bure du quêteur de suffrages, tous des Henri IV au petit pied.

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La Belgique, pour durer… (1930 verra-t-il la faillite de 1830. La Terre Wallonne. Octobre 1928)

 

La Belgique, pour durer, a-t-elle besoin de l’oppression tantôt des Flamands, tantôt des Wallons, et jusqu’ici au plus grand profit des Bruxellois et des bilingues? Un régime est-il invivable qui donnerait à la Wallonie et à la Flandre le maximum de liberté, l’assurance de leur développement dans la ligne de leur génie, la possibilité d’actuer toues les virtualités de deux peuples assez jeunes pour rêver encore de grandes choses?

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Le Belge existe -t -il (Article dans la Cité Nouvelle, 14 juin 1945)

Si, politiquement, le Belge existe, psychologiquement, il reste encore à découvrir. Tous les essais de définition se sont limités à des généralités qui relèvent des manifestations externes d’agir plus que des manières intérieures d’être.

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Les vues étroites des nationalistes belges (France et Wallonie. La Cité Nouvelle. 12 septembre 1945)

Les nationalistes belges aux vues étroites qui, faute de trouver dans le passé la justification de leur belgicisme, y ajoutent la défiance et l’hostilité à l’égard de tout ce qui risque de contredire le simplisme de leur système. La passion qu’ils mettent à combattre ce qu’ils appellent, presque toujours gratuitement, le séparatisme wallon, est une preuve de la fragilité de ce système et du peu de foi qu’ils ont dans la puissance attractive du mythe belge comme fondement et lien de l’Etat dont ils croient être les seuls bons serviteurs et défenseurs.

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La sécession? (Lettre de Belgique. Le Congrès wallon de Liège. 24 octobre 1945)

(La sécession) n’aurait aucune – mais aucune – espèce de chance d’aboutir par les voies constitutionnelles. Alors, c’est la révolution qu’on nous propose? Croit-on l’Etat assez aveugle ou assez démuni de moyens pour ne pas réagir vigoureusement, sûr de l’approbation et du soutien de la presque totalité du pays et de tous les partis?

Et

Pas plus en 1945 qu’en 1830, le problème belge n’est un problème que nous soyons autorisés à résoudre seuls. Il serait immédiatement évoqué devant les Cinq Grands et on ne peut douter un seul instant de la solution qui nous serait imposée.

La France elle-même, nous n’en doutons pas, refuserait le dangereux cadeau qu’on voudrait lui faire – tout comme Louis-Philippe en 1831 et pour les mêmes raisons.

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Elie BAUSSART et la question royale (Lettre d’Elie BAUSSART à J. LAVAUX, le 24 juin 1945)

… Ce n’est pas la première fois que cela m’arrive: j’en ai connu (des difficultés) avec la Terre Wallonne, soit au sujet de notre position vis -à- vis de certains gouvernements, soit au moment de la guerre civile en Espagne. Cela s’est chaque fois tassé. Mais avec les passions -et elles ne sont pas tièdes- provoquées par la question du Roi, la situation se tend chaque jour. Je pense aussi qu’on agit du dehors: des bien-pensants, qui ne me cèlent pas leur hostilité (je reçois depuis plusieurs jours des coups de téléphone injurieux) doivent s’indigner auprès des autorités de voir au Collège un quidam qui n’a jamais caché son hostilité à la personne de L.III. Les élèves eux-mêmes s’en mêlent – les pauvres, au crâne bourré de leurs maîtres – ; des rhétoriciens ont été se plaindre chez le Recteur que, dans le cours d’histoire que je leur fais, je n’ai pas consacré une leçon au rôle de la monarchie en Belgique. Le Recteur a cependant dû reconnaître que mon cours était d’une correction absolue et que je ne devais pas faire ce cours qui, selon lui, était plutôt du domaine d’une conférence.

En bref, l’atmosphère devient irrespirable. Il est certain que si je n’avais pas trente-sept ans de service, et si je ne jouissais pas dans la maison d’une position spéciale, d’un prestige (excusez-moi de le dire) auxquels le Recteur rendait publiquement hommage il y a quelques semaines (avant qu’il fût question du retour du roi), il est certain que je recevrais mon congé. Il n’est pas non plus douteux que si je prenais une position publique (si j’écrivais ou si je prenais la parole en public sur la question) que mon sort serait réglé.

Je consigne tout cela sans amertume – tout simplement pour vous mettre au courant d’une situation qui m’est extrêmement pénible.

Il y a un moyen d’y mettre fin: démissionner ou me faire renvoyer (ce que je veux éviter pour le scandale qui retomberait sur le Collège  et sur l’enseignement libre du coup). Je suis cependant décidé à ne pas laisser empoisonner ma vie par l’ambiguïté de la situation présente.

Malheureusement, il y a comme toujours cette fichue question d’argent. Partir, c’est ne plus toucher de traitement: et je n’ai que cela pour vivre ou à peu près.

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Elie BAUSSART et la question royale, toujours (Revue française « Politique », 15 novembre 1945)

Au total, pour définir ce que l’on pourrait appeler le léopoldisme, il faut le replacer dans son contexte historique: il apparaît alors essentiellement comme un sursaut du vieil esprit conservateur, attaché aux formes périmées d’un certain ordre social, comme une tentative, dérobée encore, d’instaurer un régime fort capable de s’opposer à la révolution. Un pré-fascisme qui ne peut encore s’avouer.

Et pour preuve de cet état d’esprit, Elie BAUSSART stigmatise l’accusation

… contre les modérés, partisans de l’abdication, de faire le jeu des extrémistes, socialistes et surtout communistes, et d’ouvrir la voie aux périlleuses aventures.

….

Rien ne permet de suspecter la loyauté des socialistes qui, dans toute leur action, n’ont jamais soulevé la question monarchique, et même dynastique, que pour proclamer leur fidélité aux institutions du pays.

Cette question royale a un impact au niveau communautaire.

Il n’est pas sans danger pour l’unité et l’existence même du pays que la ligne qui sépare la Flandre germanique de la Wallonie romane soit celle qui marque la frontière entre adversaires et partisans de l’abdication: aux Flamands, dont les extrémistes collaborateurs et traîtres, les nationalistes repentants font bloc avec les bien-pensants et le peuple fanatisé par le clergé pour afficher un royalisme véhément et agressif, s’oppose l’ensemble des Wallons, sauf la plupart des catholiques. Quand on connaît le trouble qui règne actuellement dans la Wallonie minoritaire, menacée par l’hégémonie flamande, c’est une véritable folie d’ajouter une nouvelle cause d’irritation et de méfiance. Les conseillers de Léopold III sont impardonnables de ne pas le savoir, ou, le sachant, de ne pas en tenir compte. Et c’est une aberration dde la part  de ceux qui ne cachent pas leur volonté de recourir à la force, s’il le faut, pour restaurer le Roi.

A l’annonce d’élections générales au printemps 1946, Elie BAUSSART écrit:

 

Le parti catholique essaiera d’en faire une sorte de plébiscite sur la question de Léopold III. Il s’y emploiera, sans doute par fidélité à une cause qu’il a embrassée avec autant d’imprudence que de frénésie, aussi parce qu’il escompte par là retrouver une majorité qu’il a perdue depuis l’instauration du suffrage universel après la guerre de 1914. Il y a fort peu de chances que son calcul soit couronné de succès… Mais quels que soient ses efforts pour faire de la restauration de Léopold III l’enjeu des élections, ni ses adversaires, ni, surtout, les préoccupations dominantes de l’heure ne prêteront à ce qui ne serait, au total, qu’une diversion capable, si elle réussissait, de fausser la consultation populaire.

Car, conclut Elie BAUSSART:

D’autres questions se posent, non moins graves, plus urgentes et, surtout, plus importantes pour l’avenir de la nation: celles des réformes économiques et sociales qui permettront une restauration rapide du pays, la fin des abus d’un régime où le grand capital fait la loi. C’est là-dessus que le corps électoral se prononcera et l’importance abusive donnée au problème royal ne l’emportera pas. La Belgique n’échappera pas au courant dynamique qui doit transformer et transformera la vieille Europe.

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Une réforme de l’Etat, indispensable (La Cité Nouvelle. Les élections et la Wallonie. 13 mars 1946.

Ce n’est pas seulement la défense de graves intérêts  wallons qui l’exige, c’est également l’opposition des climats politiques des deux régions. La frontière linguistique est une frontière politique.

(Il vaudrait mieux) pour le pays et pour chacune des régions que celles-ci trouvent dans une décentralisation à base fédérale la possibilité de retrouver l’une et l’autre le maximum de liberté qui sauvegarderait leurs intérêts et leurs originalités.

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