Elie Baussart

Conscience de Wallonie

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Bulletin n°74: Ite missa est

1 octobre, 2014 (12:57) | accueil | By: Bernard

Allez, la messe est terminée. C’est par ces mots que se terminaient jadis les offices religieux. Une grand-messe d’un autre type s’est clôturée le 5 septembre dernier à Paris : la Conférence Internationale pour la sécurité en Irak. Celle-ci a accouché d’un large consensus entre les 30 pays présents quant à la nécessité de « soutenir le nouveau gouvernement irakien dans sa lutte contre DAESH (l’Etat Islamique) par tous les moyens possibles, y compris une aide militaire appropriée ».

Si Didier RENDERS se veut rassurant – pas de troupes belges au sol et rien n’est décidé -, on se rappellera quand même que des F16 belges opèrent en Afghanistan et que cette opération se termine fin d’année. De l’Afghanistan à l’Irak ou la Syrie, il n’y a pas loin.

La Belgique s’orienterait donc plutôt vers une assistance aérienne : des F16 pour les frappes et des C130 pour le transport.

Alors qu’une fois de plus la guerre est à l’ordre du jour, peut-être n’est-il pas inutile de revisiter Elie BAUSSART, pacifiste convaincu et militant dans la revue Routes de Paix entre autres.

« La vieille Europe et l’Amérique, moins jeune qu’elle se croit, devraient regarder de ce côté, non pour s’opposer à ce qui, déjà, ne dépend plus d’eux, mais pour chercher avec tous une voie commune. Et qu’on cesse d’envisager l’avenir en termes de guerre » (LE SOIR du 04/05/1955).

Il faut bien reconnaître que, depuis un demi-siècle, ce souhait n’a guère été rencontré. La guerre, certes, n’est plus à notre porte, comme elle le fut en 14/18 et 40/45, mais elle a toujours, depuis, flirté avec la vieille Europe et l’Amérique.

Mais qu’est-ce qui fait courir ces 30 pays, dont certains pays arabes, en Irak ?

Comme l’affirme OBAMA, des motivations humanitaires : « Ce groupe se fait appeler Etat Islamique. Mais il faut que deux choses soient claires ; ISIL n’est pas islamique. Aucune religion ne cautionne le meurtre d’innocents et la majorité des victimes de l’ISIL sont des musulmans. Et ISIL n’est certainement pas un Etat » ?

Il y a de cela, certes : l’égorgement d’hommes – journalistes pour la plupart- en live relève d’une barbarie poussée à l’extrême. Il y a des minorités religieuses massa crées. Mais n’y a-t-il que cela ?

Dans le chef des pays arabes du Golfe qui sont loin d’être des démocraties, il y a une crainte, justifiée sans doute, de voir leur potentat mis à mal à moyen terme. Potentats qui ne semblent guère poser de problème de conscience à la veille Europe et à l’Amérique démocratiques. L’argent n’a pas d’odeur, dit l’adage. Il faut croire que le pétrole non plus.

Mais du côté des Occidentaux ?

Le pétrole, nerf de la guerre.

Signalons au passage, comme l’indiquait le journal LE MONDE récemment « que sur des réserves pétrolières de 143 milliards de barils en Irak, quelque 43,5 milliards se trouvent au Kurdistan, en plus des 25,5 milliards de barils de réserves supposées et de 3 000 à 6 000 milliards de mètres cubes de gaz. Les grandes multinationales du secteur des hydrocarbures se pressent au Kurdistan (d’où, d’ailleurs, les milliers d’Occidentaux installés à Erbil, même si leur présence ne nous est guère expliquée) et ont déjà investi dans la région plus de 10 milliards de dollars. Mobil, Chevron, Exxon et Total sont largement implantées (il est hors de question de laisser l’EI déranger ces entreprises-là) dans ce coin du monde où les exploitants pétroliers empochent 20 % des bénéfices totaux ».

Il s’agit donc surtout d’un enjeu économique. Est-il d’ailleurs des guerres qui n’aient pas en filigrane cet enjeu-là ?

On célèbre cette année le centenaire de la Première Guerre Mondiale ; celle-là aussi trouve son origine dans une quête effrénée de colonies et de marché.

Le 5 octobre 1951 – on est en pleine guerre froide, pour rappel, Jean VAN LIERDE est emprisonné à Forest pour avoir refusé de faire son service militaire. L’objection de conscience n’existe pas encore. Elie BAUSSRT lui adresse le courrier suivant :

« Je voudrais me permettre de vous exprimer ma profonde sympathie, et pour vos idées, si énergiquement et si noblement exprimées devant le c.de g.(NDLR : le conseil de guerre) ; et pour l’exemplaire leçon d’efficacité que vous donnez en montrant la voie d’une action au service de la pensée ; et pour la victoire que vous préparez à l’objection de conscience dont la loi ne pourra plus guère différer de reconnaître la légitimité.
Je ne me serais pas autorisé à vous envoyer ce témoignage si je n’avais eu le plaisir de vous voir à une réunion de Témoignage chrétien (NDLR : souligné dans le manuscrit), chez notre ami Jules Gérard. Vous n’étiez pas pour moi un inconnu- quêtes-vous maintenant !
Ma pensée rejoint la vôtre pour prier le Prince de la Paix. »

On ne peut être plus clair.

Naïveté que d’imaginer un monde sans guerre ?

Peut-être après tout.

Mais que cette naïveté-là imprègne notre pensée et montre au monde la voie d’une action au service de la paix.

C’est ce qu’Elie BAUSSART nous souffle aujourd’hui encore à l’oreille du cœur.

Il ne tient qu’à chacun de nous de l’entendre.

Bernard DE COMMER.